L'autre jour, j'étais au musée des Celtes de Libramont, à faire des dédicaces.
Il y avait un concours pour les enfants. Un petit gars (6 ou 7 ans) se met à remplir le coupon, à ma table. Mais il traîne, il hésite...
Sa mère soupire, puis claque la langue, tape du pied, roule des yeux. En bonne hypersensible et hyperempathique que je suis, je ressens l'impatience, l'énervement de la mère, une dureté aiguisée, cultivée, et en même temps, le stress grandissant du gamin, une pression qui lui paralyse la cognition et la mémoire.
Il n'arrive pas à écrire son "H". Il ne se souvient plus comment faire, cela se voit à la manière dont il a suspendu le geste, le bic en main, à ses sourcils froncés, sa respiration retenue...
Je décrypte autant son language corporel que les émotions qui émanent de lui. Sa mère, fatiguée, lui arrache le bic des mains et s'empresse de remplir le coupon d'une écriture énervée. J'ai éprouvé le sentiment d'inadéquation du gosse, sa honte, la façon dont ce simple événement se compilait à tous les petits échecs précédents et comment ce sentiment d'impuissance, face aux exigences arbitraires des adultes, fendille le peu d'estime de soi qui lui reste.
Il grandira sur cette insécurité, cette idée qu'il n'est pas à la hauteur. Au lieu de vivre, il tentera de compenser, encore et encore... à cause d'un "H" écrit trop lentement !
Personne d'autre, dans cette pièce, n'a ressenti tout cela, à part ce garçon et moi.
J'aurais aimé pouvoir l'expliquer tout haut, aider cette mère à comprendre ce qu'elle ne ressent pas, ou plus, ou nie (parce que je perçois très bien que, quelque part au fond, elle sait ce qu'elle inflige ! Elle se durcit. Pourquoi ?)
J'aurais voulu pouvoir l'expliquer tout haut pour que l'enfant comprenne que ce qu'il ressentait, la honte, la dévalorisation, la déception, etc. était provoqué par l'incapacité de l'adulte à gérer ses propres inadéquations (aucun parent n'est parfait, nous avons tous nos bagages, nos conditionnements... Mais la dévalorisation d'un enfant, surtout en public, c'est carrément pervers). J'aurais pu l'aider, à ce moment précis, à ne pas s'identifier à ces ressentis. En les conscientisant, en reconnaissant leur cause, leur provenance, il se serait détaché de l'impact et aurait pu s'épargner le mini-trauma supplémentaire, une fissure de plus à ses fondations.
Eh oui, je ressens...
On dit de moi que je suis hypersensible - je ressens tout très fort - et hyper empathique - je suis capable de percevoir les émotions, et parfois mêmes les intentions, où que je porte mon attention, autant de la part des gens que de animaux (et oui, ils ressentent, bien que ce soit non linguistiquement exprimé) et même les plantes (pas des sentiments ou des émotions, à proprement parler, mais des émanations de besoins, des énergies, des pulsions de vie).
L'hypersensitilbité et l'hyperempathie me permettent en outre détecter et catégoriser les schémas comportementaux. C'est une particularité de mon cerveau TDAH/TSA. Par ailleurs, il est également typique de l'enfant TSA d'observer son entourage d'une manière digne d'un antropologue : reconnaitre, comprendre, c'est crucial. Discerner, catégoriser les indications verbales et surtout non verbales, évaluer les incohérences, etc.
Rapidement déterminer les propriétés d'un milieu et cerner un interlocuteur est réflexe de survie que j'ai développé très tôt dans ma vie : comprendre vite à qui j'ai affaire pour savoir comment lui paraître normal afin de subir moins de moqueries et de rejet.
La soumission, le besoin de ne pas décevoir, de ne pas déplaire, étaient de plus imprimés dans mon éducation religieuse ; l'urgence et l'omniprésence de la reconnaissance du Père, de l'autorité, de l'adulte.
Rapidement déterminer les propriétés d'un milieu et cerner un interlocuteur est réflexe de survie que j'ai développé très tôt dans ma vie : comprendre vite à qui j'ai affaire pour savoir comment lui paraître normal afin de subir moins de moqueries et de rejet.
La soumission, le besoin de ne pas décevoir, de ne pas déplaire, étaient de plus imprimés dans mon éducation religieuse ; l'urgence et l'omniprésence de la reconnaissance du Père, de l'autorité, de l'adulte.
Ajoutons que culturellement, les filles ont tendance à se fondre dans la volonté de leur entourage, alors que les garçons vont résister d'avantage. Les filles masquent, les garçons bloquent. En général, bien sûr. Il existe toutes sortes de nuances et de situations.
Durant toute ma jeunesse, j'ai appris à mettre en doute mes capacités de discernement. Trop dramatique, pas rationnelle...
"Tu fais des généralités" quand au contraire, je discerne, catégorise, sous-catégorise et crée des intesections de catégories... Ou alors "tu juges les gens", me reprochait-on. J'identifiais ("je lisais) une personne et réagissait en fonction, parfois par l'attaque ou la fuite si les incohérences entre le verbal et le non-verbal étaient trop fortes, ce qui était pris pour une réaction hautaine, pour du mépris. Pourtant, je ne posais pas de jugement de valeur. Je me protégeais de quelque chose que les autres ne voyaient pas, ce qui ne cesse de me surprendre.
Ceci alors que me juger semblait être la préoccupation première de tout un chacun, à l'école et ailleurs. Imaginez ma confusion !
Le paradoxe subséquent fut que durant la première moitié de ma vie, je détectais les violences institutionnellles et les personnes toxiques, mais comme je mettais en doute la validité de ces perceptions, je me faisais régulièrement abuser et je pensais que c'était normal qu'on me fasse me sentir comme si j'étais de la merde, puisque c'était le cas. J'étais folle, après tout, non ?
Ce n'est plus le cas aujourd'hui !
"Tu fais des généralités" quand au contraire, je discerne, catégorise, sous-catégorise et crée des intesections de catégories... Ou alors "tu juges les gens", me reprochait-on. J'identifiais ("je lisais) une personne et réagissait en fonction, parfois par l'attaque ou la fuite si les incohérences entre le verbal et le non-verbal étaient trop fortes, ce qui était pris pour une réaction hautaine, pour du mépris. Pourtant, je ne posais pas de jugement de valeur. Je me protégeais de quelque chose que les autres ne voyaient pas, ce qui ne cesse de me surprendre.
Ceci alors que me juger semblait être la préoccupation première de tout un chacun, à l'école et ailleurs. Imaginez ma confusion !
Le paradoxe subséquent fut que durant la première moitié de ma vie, je détectais les violences institutionnellles et les personnes toxiques, mais comme je mettais en doute la validité de ces perceptions, je me faisais régulièrement abuser et je pensais que c'était normal qu'on me fasse me sentir comme si j'étais de la merde, puisque c'était le cas. J'étais folle, après tout, non ?
Ce n'est plus le cas aujourd'hui !
À présent, je suis souvent très surprise de la popularité qu'acquierent certaines personnes, de la facilité avec laquelle elles atteignent des statuts de leaders politiques et religieux, alors que les indications verbales ET non verbales démontrent clairement qu'il s'agit d'un pervers, d'un sadique, ou d'un des ces arrivistes manipulateurs sans scrupule que notre modèle socio-économique fabrique à la chaîne et propulse sur le devant de la scène.
On dit que les TDAH et les TSA souffrent d'un handicap, qu'il sont "dysfonctionnels", mais de toute évidence, ce sont les neurotypiques qui sont complètement aveugles, dont les indicateurs sensibles sont en panne.
En cause, le règne de cette fichue normalité qui est en fait fondée sur l'amputation des capacités humaines, une forme de mutilation opérée dès l'école dans un but de fonctionnalité. Résultat, la société est irrémédiablement coincée dans un status-quo infernal d'injustice, de violences institutionnelles et d'exploitation banalisée, de destruction du vivant en nous et autour de nous, parce que les gens n'ont plus "d'antennes", plus de discernement conscient.
Le sensible gène, dans tous les cas. Vous pouvez danser sur votre tête : si vous êtes sensible, vous serez rejeté, rabaissé, blessé, exploité, et dans une constante dévalorisation de vous-même, ce qui fait de vous des proies faciles pour les pervers narcissiques.
D'une part, le sensible est difficilement exploitable, donc négligeable, et d'autre part, il est un dangereux révélateur. Il court-circtuite le déni, bouscule les tabous, déjoue le manipulateur, force les cadenas de la sacro-sainte raison, celle-ci étant le refuge favori des dominants et des exploiteurs. La première chose qu'ils vous reprocheront pour vous déstabiliser, c'est ne n'être par rationnelle ni raisonnable.
À l'âge adulte, toute estime de moi avait été oblitérée par une dévalorisation systématique de ce que je ressentais, percevait, pensait. Ma perception des choses était en constant décalage, mauvaise, risiblee, naïve, irrationnelle, au point que le sentiment d'inadéquation était devenu permanent. Je ne pouvais pas me faire confiance.
Dans ma jeunesse, je n'ai pas eu affaire à un parent toxique ou MPN, mais à un système de croyances fondé sur ce type de personnalité, Dieu étant l'archétype MPN par excellence, à l'image du prophète fondateur de la secte où j'ai grandi !
On dit que les TDAH et les TSA souffrent d'un handicap, qu'il sont "dysfonctionnels", mais de toute évidence, ce sont les neurotypiques qui sont complètement aveugles, dont les indicateurs sensibles sont en panne.
En cause, le règne de cette fichue normalité qui est en fait fondée sur l'amputation des capacités humaines, une forme de mutilation opérée dès l'école dans un but de fonctionnalité. Résultat, la société est irrémédiablement coincée dans un status-quo infernal d'injustice, de violences institutionnelles et d'exploitation banalisée, de destruction du vivant en nous et autour de nous, parce que les gens n'ont plus "d'antennes", plus de discernement conscient.
Le sensible gène, dans tous les cas. Vous pouvez danser sur votre tête : si vous êtes sensible, vous serez rejeté, rabaissé, blessé, exploité, et dans une constante dévalorisation de vous-même, ce qui fait de vous des proies faciles pour les pervers narcissiques.
D'une part, le sensible est difficilement exploitable, donc négligeable, et d'autre part, il est un dangereux révélateur. Il court-circtuite le déni, bouscule les tabous, déjoue le manipulateur, force les cadenas de la sacro-sainte raison, celle-ci étant le refuge favori des dominants et des exploiteurs. La première chose qu'ils vous reprocheront pour vous déstabiliser, c'est ne n'être par rationnelle ni raisonnable.
À l'âge adulte, toute estime de moi avait été oblitérée par une dévalorisation systématique de ce que je ressentais, percevait, pensait. Ma perception des choses était en constant décalage, mauvaise, risiblee, naïve, irrationnelle, au point que le sentiment d'inadéquation était devenu permanent. Je ne pouvais pas me faire confiance.
Dans ma jeunesse, je n'ai pas eu affaire à un parent toxique ou MPN, mais à un système de croyances fondé sur ce type de personnalité, Dieu étant l'archétype MPN par excellence, à l'image du prophète fondateur de la secte où j'ai grandi !
Or, je le sais à présent, ma perception des choses est valable et digne de foi ! Mes capacités de discernement sont d'autant plus perfomantes aujourd'hui que je suis enfin libre d'en prendre conscience, de mieux la comprendre, de la peaufiner en y ajoutant l'expérience de vie. J'apprends à embrasser le décalage comme un élément positif dans une société hypocrite, à comprendre l'inversion dont j'ai été la victime : le dysfonctionnel est très utile parce qu'il n'est pas noyé dans la masse, pas exploité, pas érodé. Il offre un point de vue extérieur, un nouvel angle d'approche.
Nous sommes TOUS des êtres sensibles, à la base, avec des variations d'intensité, mais le contexte artificiel - le stoïcisme exacerbé, le règne du mental, la division et le cloisonnement de notre être et la civilisation qui nous sépare de l'authenticité - nous dénature très tôt, nous déconnecte l'un de l'autre, dès la petite enfance.
En fait, les hypersensibles empathiques sont des êtres naturels.
Mais bientôt, l'hypersensibilité et l'empathie deviendront des pathologies... On prescrira des régulateurs. Anxiolitiques, anti-dépresseurs... "Anti- humains".
Au lieu de cela, je dis : conscientisons notre sensibilité ! Elle est une forme d'intelligence incroyable ! Autrefois, je me culpabilisais et me dévalorisais d'être aussi réceptive. Aujourd'hui, je pense que c'est un formidable atout ! Douloureux, certes, car la violence ordinaire, par exemple celle infligée à l'enfance et son impact à long terme, est difficile à absorber au quotidien. Je dois souvent me protéger, ce qui fait de moi une personne moins sociable et active.
Certains jours, je dois éviter la compagnie de mes semblables, choisir précautionneusement les endroits que je fréquente, afin de m'épargner un peu.
L'ecriture de mes romans de fiction est un moyen merveilleux de découverte et de partage. À la fois une thérapie personnelle, afin d'identifier ce qui ne m'appartient pas (ce qui est inculqué) et de rejoindre ce qui m'appartient (ce qui est inné). C'est une étude du monde dans lequel j'ai vécu, sa reconstitution par la mise en scène littéraire. Mais c'est aussi une exposition de mon monde intérieure, et une vie par procuration, par l'intérmédiaire de mes personnages.
Un exutoire de première qualité ! Et un refuge, aussi.
L'hypersensibilité et l'hypersempathie sont des thèmes récurrents, dans mes romans. Tous leurs aspects y sont illustrés.
Un exutoire de première qualité ! Et un refuge, aussi.
L'hypersensibilité et l'hypersempathie sont des thèmes récurrents, dans mes romans. Tous leurs aspects y sont illustrés.
FLB