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"We are all connected at one point" illustration numérique de Maria Rome (2018), Canada |
Je cherchais les membres de ma tribu parmi les artistes, me disant qu’une personne capable de saisir, d’interpréter et de représenter la beauté du monde, le mouvement de la vie, de discerner la réalité derrière les trompe-l’œil et de l’exprimer indirectement en usant de couleurs, de notes, de mots, a forcément été puiser en-deçà du monde physique, là où s’épanouit l’intuition, l’empathie, les sens et les émotions, au niveau de l’énergie vitale avant qu’elle soit piégée en matière. Je ne peux qu’imaginer que cette personne, à chaque voyage à travers sa créativité, touche à l’essentiel et en revient bouleversée, sublimée, édifiée.
Et je me prends une claque magistrale parce que la démarche créative, quoique qualitative, peut très bien se confiner à l’intellect, s’en tenir à la technique sans pourtant perdre en originalité, et ne pas forcément signifier une plongée dans l’être sensible.
J’ai commis la même erreur en m’impliquant dans le milieu LGBT, croyant naïvement que pour s’affirmer et vivre en toute intégrité avec soi-même, il fallait rejoindre une dimension sous les apparences, sous le physique, là où tout est UN, là où UN est diversité, et puis agir en accordance avec cette conscientisation.
Là encore, je me suis prise la réalité comme on se prend une porte vitrée en pleine face. BANG !
Les esprits libérés et affirmés peuvent rester petits et mesquins, et les personnalités se réclamant de la diversité se contenter d’un entendement épidermique.
La démarche identitaire n’est pas plus systématiquement profonde que la démarche artistique parce qu’elle demeure égocentrée, déconnectée du réseau sensible collectif, et qu’elle doit exister dans un milieu concurrentiel, matérialiste et commercial.
L’inhibition et le déni de soi auquel on nous conditionne depuis l’école, et même depuis la crèche – celle qu’on met sous le sapin autant que celle où l’on fourgue les nourrissons – et cette vision hiérarchique, cette verticalité de la relation, sont à présent inscrits dans notre ADN, semble-t-il.
Notre développement est isolé, il est devenu strictement individuel et marqué par la compétitivité. Quelle que soit la porte choisie pour se faire une place identitaire dans la société, elle débouchera sur des escaliers à gravir par crainte de les dégringoler. Toute relation nous met face à deux alternatives : être supérieur à l’autre ou lui être inférieur.
Mais dans mon incorrigible candeur, je ne peux m’empêcher d’espérer, à chaque rencontre, me retrouver devant un égal, désarmé et authentique – ou qui, du moins, aspire à l’être ; un humain intègre connecté au vivant, et surtout dénué d’ambitions.
Quelqu’un qui relèverait de ce que Victor Hugo appelait « les cœurs sans stratagèmes ».
Je trouverai peut-être mon bonheur du côté des neuro-atypiques ?
À suivre...
FLB